Romains de la décadence
1847
XIXème siècle
Huile sur toile 772 x 472 cm
(Art académique)
Analyse
Le thème classicisant, le format ambitieux et les références à peine déguisées à la grande peinture de Véronèse évoquent les grands tableaux de David inspirés des épisodes de l’histoire romaine. Mais nous sommes loin des héros glorieux de la Rome républicaine : ce sont les derniers temps de l’empire romain, ceux de la décadence, qui sont ici évoqués.
Au centre, les protagonistes sont visiblement épuisés par une nuit de débauche. Le regard désenchanté de la jeune femme au centre, les gestes accablés ou incertains de la plupart des personnages qui brandissent encore leur coupe disent assez leur fatigue et leur ébriété. À gauche, un jeune poète pleure aux pieds d’une statue tandis que, à droite, deux philosophes font irruption dans cet espace théâtral et, par leur mouvement de recul, expriment toute leur réprobation. La présence des statues souligne le contraste entre le spectacle de la Rome déchue et son passé glorieux.
Ainsi présentée, la scène de débauche ne peut faire scandale : elle est doublée d’un discours moralisateur sur la grandeur et la déchéance des civilisations.
Toute la culture artistique de Couture est utilisée pour cette vaste mise en scène où l’on trouve des références évidentes aux Noces de Cana de Véronèse (Louvre, Paris), mais aussi aux antiques du musée du Louvre qui ont servi de modèles pour les statues, à Raphaël (le groupe du fond à droite évoque la Déposition de la galerie Borghèse à Rome), à Rubens et à bien d’autres encore…
Ce vaste tableau fut présenté par Couture au Salon de 1847 où il fut très bien accueilli. L’État français l’acheta immédiatement et le présenta aux Expositions universelles de 1855 et 1889. Puis il tomba dans l’oubli et resta longtemps dans les réserves du Louvre avant de retrouver une place de choix au musée d’Orsay.